POUR LE DECOUVRIR

“ Surtout écoutez ! Kru kru kru… il vole. Klieuuuuuu… il est posé. Couic- Couci-Couic-Couic-Couic… répétitif il chante. Un Kouic bref, il est dérangé et il le fait savoir “ Parcourez les forêts de grands hêtres ou mieux les forêts mixtes de hêtres et résineux. Cherchez les traces de son passage en inspectant les arbres morts et levez les yeux lorsque vous êtes en présence d’un beau hêtre, droit, lisse, assez haut, sans branches sur au moins 6 mètres et le plus souvent dans un endroit dégagé comme en bordure d’un chemin forestier par exemple. Mais surtout écoutez ! - Kru kru kru kru kru kru… l’oiseau est en vol. Lui seul émet ce cri très caractéristique qui s’entend de très loin. - Klieuu …, klieuu…, tiens, il s’est posé et lance cri reconnaissable entre mille. Lorsqu’il chante vous aurez droit au Couic-couic-couic-couic-couic… répétitif. C’est un peu comme le pic vert mais avec l’expérience on sait différencier les deux très facilement. Son chant résonne en forêt et s’étend sur un kilomètre. Si vous avez la chance de le voir s’accrocher au tronc d’un arbre, vous allez être surpris par le silence de son vol à l’arrivée. Seul le claquement des griffes sur le tronc sera audible. Lorsqu’il est dérangé, il le fera savoir et partagera ce dérangement avec ses congénères par un “Kouic” bref et puissant. L’avez-vous vu passer ? Son envergure de 75 cm, lui impose de voler différemment des autres oiseaux, avec ses ailes relativement courtes il a l’allure du geai avec peu de battements il peut zigzaguer entre les arbres. Une fois agrippé, il va grimper par des bonds puissants, appuyé solidement sur sa queue rigide. Un bec blanchâtre, un iris clair et sa drôle de pupille noire, une tête anguleuse, la calotte écarlate, c’est un mâle. Et puis tout à coup, ce grand fracas ? On dirait une rafale de mitrailleuse… C’est le tambourinage. Tous les pics le pratiquent par exemple sur une branche sèche qui sert de caisse de résonnance. Mais alors celui du pic noir, c’est impressionnant, il dure entre une et trois secondes, comporte 35 à 45 coups de bec et est audible à plus d'un kilomètre. Le martèlement, des séries de 80-140 coups de bec/minute, exprime l'excitation, surtout en présence d'un congénère et n’est, lui, audible qu’à faible distance. Le piquage (réaction à un dérangement, par exemple au nid) est encore plus faible.

Le Pic Noir

L’architecte de la forêt Si vous avez l’occasion de l’observer et de partager quelques instants en sa compagnie, vous courrez un risque, celui de l’addiction. Vous voilà prévenus !

LA REPRODUCTION

“ En une douzaine de jours, trois à cinq oeufs vont éclore “ C’est au printemps que vous aurez le plus de chance de l’observer. Le couple se forme à la fin de l’hiver et commence à chercher un lieu pour creuser sa loge. Soit le Pic Noir crée une nouvelle loge pour la nidification, soit il réhabilite une ancienne loge. Mes observations tentent à montrer qu’il privilégie la réhabilitation d’anciennes loges au détriment de la construction neuve. Pendant la couvaison, (fin avril, début mai) le couple se relaie, les deux membres du couple partagent les rôles et c’est le mâle qui fait le plus gros du boulot d’incubation. Très vite, en une douzaine de jours, ce qui est remarquable pour un oiseau de cette taille, trois à cinq œufs vont éclore. Là, commence la quête de nourriture pour les jeunes oisillons, A tour de rôle, les pics vont alors quitter le nid à la cadence d’un aller- retour toutes les heures environ. A leur retour, on ne distingue pas de nourriture dans le bec du Pic car toute la nourriture est avalée. Le Pic pénètre alors dans la loge, descend dans le noir, la tête en bas et au premier contact du bourrelet à la base du bec que comportent les jeunes pics, le pic adulte ouvre largement son bec afin que les oisillons puissent profiter de la régurgitation. L’opération prend entre une et deux minutes et on devine la difficulté de cette tâche dans l’obscurité, tête en bas dans un trou sans recul. Pas facile le rôle de papa et maman Pic Noir ! Les jeunes sont nus à l'éclosion et nourris 15 à 30 fois par jour selon leur âge avec de grosses larves d’insectes, des centaines de fourmis et d’autres insectes. Plus tard, (vers mi à fin mai) lorsque les jeunes sont plus grands, ils sortent la tête et se présentent à la sortie de la loge en attendant leur bectance, c’est l’occasion unique de faire la photo de famille. Les jeunes quittent le nid à l'âge de 27-28 jours vers début juin. Après leur envol, une partie d’entre eux est accompagnée par le mâle et une autre par la femelle. L’indépendance définitive est acquise fin juillet ou en août. Le plumage des jeunes à la sortie du nid est plus ou moins nuancé de brun avec un bec nettement plus court, paraissant plus épais. D’après les études, les nichées comprennent un peu plus de mâles que de femelles reconnaissables très précocement à la seule observation de l’étendue de leur calotte rouge. J’ai personnellement constaté ce fait sur plusieurs nichées il n’y avait qu’un seul petit, c’était un mâle à chaque fois. L’échec de la reproduction vient souvent du Choucas et du Pigeon Colombin qui cherchent à usurper le nid du pic avant même que la ponte ait commencé, mais surtout, du fait d’inondation du nid lors de printemps très pluvieux. Le Pic noir n’effectue qu’une seule nichée par an, mais une ponte de remplacement est possible dans la même cavité ou une autre, à proximité. La longévité maximale observée grâce aux données de baguage est d’environ 14 ans.

PRESENTATION

“Monsieur Pic porte un casque de chantier rouge” Le Pic Noir est le plus grand des pics européens avec ses 45 cm de long et son envergure de 75 cm. Il est vêtu d'un plumage entièrement noir quelques fois teinté de brun aux extrémités des ailes. Il est coiffé d’une calotte rouge vif. Monsieur est facile à identifier avec sa calotte qui recouvre entièrement la tête. Madame est plus discrète, elle arbore une simple tâche rouge à l’arrière de la nuque. Pour ne pas se tromper, retenez que Monsieur porte toujours un casque de chantier rouge. Le bec est blanc pâle sauf l'extrémité et l'arête supérieure noirâtres, l’iris est jaune pâle, les pattes grises. Le Pic Noir vit dans les forêts de feuillus et de conifères en plaine et en moyenne montagne. Il se nourrit essentiellement de fourmis et de larves d’insectes qu’il se procure en creusant dans le bois d’arbres morts ou dépérissant en utilisant sa longue langue rétractile. Le Pic n’est pas fidèle et une fois la période de reproduction achevée, chacun vit sa vie jusqu’à la saison suivante ou de nouveaux couples vont se former. C’est un oiseau diurne dont l'activité commence relativement tard en hiver. Il dort dans un ancien nid qu’il fréquente parfois durant de longues périodes. Comment le Pic fait-il pour trouver assez de larves et d’insectes xylophages pour se nourrir et nourrir sa progéniture ? Comment a-t-il pu deviner que l’arbre en était infesté ? C’est son secret, la base de sa survie ! Il défonce les souches et les arbres morts tout au long de l’année, vous pouvez trouver des souches avec de nombreux gros copeaux à leurs pieds, c’est le travail d’un Pic Noir. Ensuite la décomposition fait son œuvre, les fourmis et autres insectes ne tardent pas à s’installer et à attirer notre oiseau qui en raffole. Surtout de leurs grosses nymphes riches en protéines que sa très longue langue collante va chercher au plus profond des galeries. Les grandes ouvertures verticales le long d’un tronc de bois mort sont appelées des forges. Moins il y a de nourriture disponible, plus le territoire est vaste et plus difficile sera sa rencontre. Le Pic Noir vit seul sur un immense territoire de 8 à 10 km² d’où il écarte ses congénères. Il mène une vie en solitaire en dehors de la période de reproduction.
LA LOGE, c’est un peu l’Auberge Espagnole “ Certaines espèces ne seraient pas présentes sans la présence du Pic Noir”  Le Pic Noir est un architecte de la forêt, avec son bec puissant (qui pousse sans cesse), il creuse le tronc des arbres  (hêtres principalement) pour y loger sa petite famille. L’espèce  peut  être  fidèle  à  son  nid  plusieurs  années.  Le  nid  est  creusé  dans  un  arbre  sain,  directement  ou  par agrandissement  d'une  ébauche  antérieure. La plupart du temps, il débutent un chantier, puis s’accordent une pause en comptant sur l’aide des champignons qui vont dégrader le bois, les fibres du bois deviennet alors plus tendres et le chantier peu continuer. Un jour arrive où la loge est prète à être habitée, mais les travaux ne sont pas finis pour autant. Plusieurs cavités sont creusées certaines pour la couvaison, d’autre pour le repos, et chaque année les loges sont rafraichies. Le champigon gagne en profondeur et la loge devient de plus en plus profonde jusqu’au jour où elle est trop profonde pour les oisillons, c’est le moment de laisser la place aux autres habitants.  Le  nid  est  creusé  par  les  deux  sexes  mais  surtout  par  le  mâle. Une cavité de 30 à 60 cm de profondeur fera office de logement pour la période de reproduction. Cette cavité ne servira que le temps de nidification jusqu’à l’envol des jeunes pics. Il arrive que plusieurs loges se trouvent sur un même arbre. Le fond est garni de poussière de bois et de quelques copeaux. Les loges à Pic Noir sont difficiles à confondre, elles sont ovales et mesurent de 8 à 9 cm de large et 12 à 14 cm de haut. L’arbre doit avoir le tronc dépourvu de branches sur une hauteur de 5 à 20 m et être assez gros (diamètre 40cm à 50cm minimum) et il présente en général une écorce lisse pour éviter aux prédateurs un accès trop facile à la loge. On constate généralement une préférence pour le hêtre ou la partie haute du pin sylvestre. D’autres   essences   sont   cependant   également   utilisées selon le milieu  (chênes,   peupliers,   tremble,   merisier,   sapin pectiné, ...  Mais le travail du pic profitera à d’autres clients.  Des squatters vont se succéder et certaines espèces ne seraient pas présentes dans nos forêts sans la présence du Pic Noir. Le pigeon Colombin par exemple, un pigeon forestier et migrateur. On pourra y voir aussi la chouette hulotte, la chouette chevêchette ou la plus rare chouette de Tengmalm. La sitelle torchepot qui retravaille soigneusement l’entrée avec de la boue avant d’y nicher. Des mammifères comme la martre, le loir ou l’écureuil, mais aussi des chauves-souris, s’y succèdent. Certains anciens nids de pic noir sont remplis de miel par des essaims d’abeilles, d’autres hébergent des nids de frelons.  Si au pied d’un beau hêtre vous trouvez des copeaux d’une taille comprise entre 0.5 et 4 cm de long et de quelques millimètres d’épaisseur, c’est un pic noir qui creuse une loge, alors levez les yeux !   Le Pic Noir reste dépendant des vieilles forêts et des arbres morts, il est utile de protéger ces arbres morts qui représentent son garde-manger. Depuis quelques années, l’ONF maintient sur pied certains arbres à cavités, ils sont souvent marqués d’un triangle renversé ( c’est un moyen aisé de trouver des loges ! )  ainsi toute une variété d’espèces bénéficie des loges de Pic Noir.

TROUVER UNE LOGE

“ trouver une loge active à bonne hauteur, bonne orientation, est plus difficile “ Il m’aura fallu trois années pour découvrir cette espèce, j’ai consulté des sites spécialisés, épluché une étude très complète de Volker Günther un ornithologue Allemand qui a inspecté plus de 800 loges sur trois ans. J’ai ensuite appris à repérer les loges, à comprendre les habitudes du pic, à reconnaitre son chant ses cris, que dis-je ? ses chants et ses cris car oui il en a plusieurs. Trouver une loge à pic n’est pas facile au début, mais au fil des trouvailles, cela devient un automatisme et on décèle immédiatement l’arbre qui potentiellement pourrait contenir une loge, c’est même addictif, je ne peux plus marcher en forêt sans lever la tête lorsque je vois un hêtre à potentiel de loge. Le plus difficile étant de trouver une loge active le temps de la ponte et du nourrissage des petits pics, car une fois les petits envolés, cette loge restera inoccupée ou juste occupée le soir en guise de dortoir. Lorsque l’on est en présence d’une loge à Pic Noir, il est impératif de prendre ses précautions pour ne pas déranger l’oiseau surtout pendant la période de reproduction. Donc trouver une loge est devenu relativement facile pour moi aujourd’hui, trouver une loge active c’est plus délicat, mais trouver une loge, active à bonne hauteur, bonne orientation et bonne lumière pour la photo est bien plus difficile. Et puis pour ne rien simplifier, le Pic Noir est assez farouche, le bruit du déclencheur va le perturber. Un petit conseil, si vous cherchez des loges faites-le au courant de l’hiver lorsque les arbres sont dépourvus de feuilles, car une fois la forêt reverdie, cela devient bien plus difficile.

LE PHOTOGRAPHIER

“ Pour le prendre en vol à l’arrivée à la loge, anticipez le déclenchement “ Le moyen efficace d’observation est la tente d’affût, un simple camouflage ne sufffit pas, soignez votre planque car chacun de vos mouvements va alerter le pic et le déranger. Le Pic Noir se réveille tôt, donc pour ne pas être vu, l’idéal est d’arriver de nuit. Une alternative est la phase d’observation pour anticiper les allées et venues du Pic. Installez-vous pendant leur absence. Cet exercice pour trouver le moment opportun de l’installation est difficile au début, ensuite après plusieurs séances d’observation cela devient plus facile. Quoi qu’il en soit commencez toujours par une observation aux jumelles et à bonne distance avant d’agir au risque de le déranger, puis installez-vous rapidement et ne faites plus aucun bruit. Pour quitter l’affût choisissez le moment les pics ont soit quitté le logement ou quand ils sont confinés dans la loge. Après de longues observations vous saurez trouver le moment opportun. Lors de la première observation du Pic Noir il ne faut pas agir immédiatement, il faut prendre le temps d’observer son comportement et le laisser s’habituer à votre présence avant de déclencher, cela est frustrant, mais c’est impératif. Lors de la phase d’observation aux jumelles, regardez comment et par le Pic accède à la loge et placez votre affût en conséquence. Avec du recul, je constate que le pic noir est bien moins farouche qu’un pic cendré ou un pic vert. Il va s’habituer à votre présence si pour autant vous restez bien caché, immobile et si vous eliminez le bruit du déclencheur en habillant votre boitier d’une housse en complément du mode silencieux. Perturbé, il va montrer des signes d’inquiétude par de petits cris plaintifs et puis au fil du temps, si la gène n’est que telmporaire et limitée, il va s’accomoder de la situation. C’est qu’il est utile de savoir juger de l’importance des cris plaintifs. Si les cris sont puissants et incessants, c’est que vous êtes trop bruyant, trop voyant ou trop près tout simplement, en somme que vous dérangez trop et il faut alors quitter les lieux. Il faut apprendre à se tenir à bonne distance, arriver et partir au bon moment et se faire très discret. Techniquement, une focale de 300mm est un minimum, couplée à un boitier APS-C cela peut suffire. Il faut privilégier les focales à grande ouverture et un 300 f4 est le minimum. Personnellement j’utilise un boitier Nikon D750 équipé d’un objectif Nikon 200-500 f5.6 à ouverture constante, monté sur trépied. C’est le milieu qui va conditionner vos réglages. En milieu dégagé avec une bonne lumière c’est plutôt facile et votre vitesse minimale pour le prendre en phase d’arrivée en vol sera de 1/2000s au moins. Lorsque c’est encombré ou mal éclairé et que la vitesse manque, profitez des moments le pic est statique, accroché à l’arbre, attendez le moment la tête du pic se détache du tronc, pour cela placez votre affût non pas face à la loge mais plutôt de profil. En milieu encombré, une option est de faire des photos à contre-jour, cela vous permet de réaliser une photo à bonne vitesse malgré un manque de lumière. Faites en sorte que l’oiseau se détache du fond et surtout anticipez votre déclenchement, car ça va très vite. Une astuce est de préparer votre cadrage, utiliser une télécommande pour déclencher puis de quitter l’œilleton du boitier et veiller à son arrivée. Il arrive que le Pic annonce son arrivée quelques minutes avant par un cri au loin, soyez alors très attentif pour déclencher par anticipation. Avec l’habitude on arrive à déclencher au bon moment et aujourd’hui je me passe du mode rafale pour faire le moins de bruit possible en déclenchant. Il arrive souvent par le bas de la loge et remonte au dernier moment en sortant ses aérofreins à la dernière seconde. Lorsque le soleil joue avec le feuillage et crée des ombres ou quand il éclaire le tronc brillant du hêtre, profitez de ces instants pour faire du clair-obscur en utilisant le mode de mesure d’exposition ponctuel. Et n’oubliez pas, lorsque les conditions sont difficiles, osez les contre-jours, les ombres chinoises, les reflets… ce n’est pas le matériel qui fait une belle photo, mais c’est le photographe qui aura su mettre à profit des conditions particulières par sa créativité. Bref, vous allez voir qu’on se s’ennuie pas dans sa tente affût en photographiant le Pic Noir. Dernier point : évitez les lieux de passage, de randonneurs, de vététistes. Ce n’est pas qu’ils dérangent le pic, car lui est habitué à leurs passages, mais s’ils voient votre tente affût ils vont venir voir et discuter, faire du bruit et le Pic mettra d’autant plus de temps à revenir sur les lieux, je parle d’expérience. Vous l’aurez compris, le Pic Noir fascine, me fascine, mais attention si vous avez l’occasion de l’observer et de partager quelques instants en sa compagnie, vous courrez un risque, celui de l’ addiction et il est difficile d’en sortir, vous voilà prévenus ! Sources: Cahiers d’habitats “Oiseaux” MEEDDAT-MNHN - Untersuchungen zur Ökologie und zur Bioakustik des Schwarzspechtes (Dryocopus martius) von Volker Günther - Des pics et des arbres par Philippe Legrand & Michel Bartoli - Revue Forestière Française par M.Cuisin 1967 - Der Schwarzspecht und seine Hölen (Deutsche Wildtier Stiftung Dr.Prof. Roman Herzog) - Et évidemment mes propres observations.

LE PIC NOIR en images

Au départ juste une rencontre, aujourd’hui, une passion
24 Mars 2015
26 Mars 2015
74 loges répertoriées sur 6 ans. Les 74 loges sont réparties sur 49 arbres. Tous sont des hêtres d’un Ø supérieur à 40 cm à hauteur d’épaule . 31 arbres comportent 1 loge. 13 arbres comportent 2 loges. 3 arbres comportent 3 loges. 2 arbres comportent 4 loges. Les loges se situent entre 6 et 15 m de hauteur. La moyenne se situe à environ à 8-9 m. Les arbres sont toujours dépourvus de branches sous le niveau de la loge. Les arbres sont généralement lisses et droits (pour limiter l’accès aux prédateurs). L’orientation des loges reste aléatoire même si on devine un pic vers l’ouest et le sud-est (voir graphique ci-contre), selon mes observations elle dépend principalement de la topographie du terrain. Une loge sera placée de manière à favoriser l’arrivée à la loge et l’envol depuis la loge, en clair, elle sera toujours orientée vers un endroit bien dégagé.
Janvier- février: 		Formation des couples (parades, tambourinages très sonores, cris de contact doux) Mars - début avril: 		Creusage ou réhabilitation d’une loge. Mi-avril - fin avril:		Ponte et incubation pendant 12 à14 jours Début mai à mi-mai:	Eclosion puis nourrissage pendant 27 à 28 jours Fin mai - début juin:		Envol.  Calendrier des activités (constaté en Lorraine dans le massif Vosgien - altitude des loges 600 à 900m)  

Extrait du carnet de terrain avec les

fréquences de nourrissage

Arbre à 3 loges, on devine que celle du haut est la plus récente. Celle du bas est cicatrisée. Des traces de coups de becs sont visibles sur le tronc.
Marc Albrecht Photographies
Une loge réhabilitée par un couple de sitelles torchepot

Quelques données basées

sur mes propres observations

Mâle
Femelle

Faire une photo en contre-plongée au pied de l’arbre est-ce

source de dérangement ?

Les 3 points essentiels à mon sens:

1. La période pour faire la photo :

Ne pas vouloir faire cette photo en période de couvaison ou de creusage de la loge lorsque la présence des pics est permanente. Il faut

choisir le moment où les jeunes pics sont nés, car c'est là que les parents s'absentent un bon moment pour leur quête de nourriture avant de

revenir à la loge.

2. Le moment opportun :

Voilà l'importance de passer du temps en leur compagnie, apprendre à savoir quand il partent et quand ils viennent. Certes ils ne mettent pas

à disposition la fiche horaire type SCNF, mais avec l'expérience j'ai constaté qu'il y a toujours un créneau suffisant ou aucun des deux pics

n'est présent pour installer le trépied sans déranger. Il faut arriver à déceler le vrai départ de la loge d'un déplacement ponctuel où le pic reste

dans les alentours en surveillance de son congénère, cela ne s'improvise pas mais s'apprend au fil des années, oui, je dis bien des années et

non de quelques heures d’observation.

3. Le déclenchement :

Le boitier doit être camouflé et surtout emballé à outrance, j'utilise un vieux sweat et j'emballe mon boitier comme pour un envoi DHL !

Testez le résultat chez vous et n'improvisez pas sur place en dernière minute.

Une fois le pic arrivé à l'arbre concentrez-vous sur l'attitude du pic, ne déclenchez que quand c'est nécessaire. Attendez qu'il tourne la tête sur

le côté, photographier sa nuque ne sert à rien ! Je me sert du boitier dans la tente affût pour visualiser à travers l'œilleton le moment propice

pour déclencher, si vous n'utilisez qu'un boitier, observez aux jumelles.

Ma réponse est oui et pourtant je le pratique !

Cette question je me la suis posée lors du festival photo Natur’Emotion de Scy-Chazelles (en 2013) où j'ai pu m'entretenir longuement sur le

sujet avec un photographe de renom belge qui l'avait pratiqué. J'ai alors appris qu'il faut apprendre à le connaître, savoir décoder ses cris,

son comportement bien avant de vouloir appuyer sur le déclencheur.

J'ai côtoyé le pic pendant 4 ans (4 saisons) sans faire la photo que je m'étais imaginée. Je peux aujourd'hui affirmer que je suis capable de

prendre ce type de photo sans dérangement majeur, car on dérange toujours si ce n'est que par sa simple présence.

Je partage aujourd'hui mon expérience simplement dans l'intérêt du respect des règles nécessaires si vous êtes tenté par ce type de prise de

vue.

Avant tout, préparez votre matériel à l'avance pour minimiser le temps d'installation, pas d'improvisation sur place. Montez votre boitier sur

le trépied, vérifiez que vous êtes capable de maintenir le boitier en bonne position vers le haut sans qu'il ne se dérègle (rotule non adaptée,

zoom trop « lâche »...) On teste l'ensemble avant l'installation, on vérifie que le boitier réponde bien à la télécommande et on s'assure que

piles et accus soient bien chargés.

Réglez le boitier en mode silencieux, utilisez une télécommande radio de grande portée (je suis à plus de 30m), un trépied camouflé et

surtout de quoi insonoriser votre boîtier correctement.

Personnellement j'utilise une optique fixe (300 f4), car un zoom en position verticale peut bouger s'il n'est pas assez « ferme » et un boitier

avec un écran orientable pour faciliter la mise au point.

Ma première tentative n'a pas été la bonne car j'avais sous-estimé le bruit du boîtier, il faut vraiment emmitoufler l'ensemble boitier/objectif.

Pour ce faire, je fais la mise au point sur le bas de la loge (c'est là que viendra s'accrocher le pic), puis je verrouille le réglage. Pas d'autofocus

Lorsque l'on débute la photo du pic noir, on commet des erreurs, on bouge trop, on est mal caché, on arrive au mauvais moment, on est trop

prêt, on fait du bruit et cela se traduit par un comportement sonore du pic. Le pic perturbé le signale à son conjoint et à son entourage par

des cris plaintifs successifs, c'est le signe que vous dérangez.

En 2015, j'ai passé une semaine complète en leur compagnie, 6 jours tous les jours et pourtant je n'ai pas réussi à faire de belles photos mais

j'ai appris à les connaitre.

Alors, faire une photo en contre- plongée de pic noir au pied de l'arbre est-ce source de dérangement ?

Ma réponse est toujours oui, mais de manière maîtrisée. Le moyen de m'en convaincre est le silence du pic lorsqu'il arrive à la loge et lorsque

je fais ma photo, pas un cri d'avertissement, il vaque à ses occupations comme si de rien n'était.

Connaissant aujourd’hui son comportement face au dérangement, son silence est pour moi la meilleure des preuves.

Le Pic Noir

L’architecte de la forêt Si vous avez l’occasion de l’observer et de partager quelques instants en sa compagnie, vous courrez un risque, celui de l’addiction. Vous voilà prévenus !

PRESENTATION

“Monsieur Pic porte un casque de chantier rouge” Le Pic Noir est le plus grand des pics européens avec ses 45 cm de long et son envergure de 75 cm. Il est vêtu d'un plumage entièrement noir quelques fois teinté de brun aux extrémités des ailes. Il est coiffé d’une calotte rouge vif. Monsieur est facile à identifier avec sa calotte qui recouvre entièrement la tête. Madame est plus discrète, elle arbore une simple tâche rouge à l’arrière de la nuque. Pour ne pas se tromper, retenez que Monsieur porte toujours un casque de chantier rouge. Le bec est blanc pâle sauf l'extrémité et l'arête supérieure noirâtres, l’iris est jaune pâle, les pattes grises. Le Pic Noir vit dans les forêts de feuillus et de conifères en plaine et en moyenne montagne. Il se nourrit essentiellement de fourmis et de larves d’insectes qu’il se procure en creusant dans le bois d’arbres morts ou dépérissant en utilisant sa longue langue rétractile. Le Pic n’est pas fidèle et une fois la période de reproduction achevée, chacun vit sa vie jusqu’à la saison suivante ou de nouveaux couples vont se former. C’est un oiseau diurne dont l'activité commence relativement tard en hiver. Il dort dans un ancien nid qu’il fréquente parfois durant de longues périodes. Comment le Pic fait-il pour trouver assez de larves et d’insectes xylophages pour se nourrir et nourrir sa progéniture ? Comment a-t-il pu deviner que l’arbre en était infesté ? C’est son secret, la base de sa survie ! Il défonce les souches et les arbres morts tout au long de l’année, vous pouvez trouver des souches avec de nombreux gros copeaux à leurs pieds, c’est le travail d’un Pic Noir. Ensuite la décomposition fait son œuvre, les fourmis et autres insectes ne tardent pas à s’installer et à attirer notre oiseau qui en raffole. Surtout de leurs grosses nymphes riches en protéines que sa très longue langue collante va chercher au plus profond des galeries. Les grandes ouvertures verticales le long d’un tronc de bois mort sont appelées des forges. Moins il y a de nourriture disponible, plus le territoire est vaste et plus difficile sera sa rencontre. Le Pic Noir vit seul sur un immense territoire de 8 à 10 km² d’où il écarte ses congénères. Il mène une vie en solitaire en dehors de la période de reproduction.

LA REPRODUCTION

“ En une douzaine de jours, trois à cinq oeufs vont éclore “ C’est au printemps que vous aurez le plus de chance de l’observer. Le couple se forme à la fin de l’hiver et commence à chercher un lieu pour creuser sa loge. Généralement, le Pic Noir crée une nouvelle loge pour chaque nidification, mais il peut arriver qu’une ancienne loge soit réhabilitée. Pendant la couvaison, (début mai) le couple se relaie, les deux membres du couple partagent les rôles et c’est le mâle qui fait le plus gros du boulot d’incubation. Très vite, en une douzaine de jours, ce qui est remarquable pour un oiseau de cette taille, trois à cinq œufs vont éclore. Là, commence la quête de nourriture pour les jeunes oisillons, A tour de rôle, les pics vont alors quitter le nid à la cadence d’un aller-retour toutes les heures environ. A leur retour, on ne distingue pas de nourriture dans le bec du Pic car toute la nourriture est avalée. Le Pic pénètre alors dans la loge, descend dans le noir, la tête en bas et au premier contact du bourrelet à la base du bec que comportent les jeunes pics, le pic adulte ouvre largement son bec afin que les oisillons puissent profiter de la régurgitation. L’opération prend entre une et deux minutes et on devine la difficulté de cette tâche dans l’obscurité, tête en bas dans un trou sans recul. Pas facile le rôle de papa et maman Pic Noir ! Les jeunes sont nus à l'éclosion et nourris 12 à 29 fois par jour selon leur âge avec de grosses larves d’insectes, des centaines de fourmis et d’autres insectes. Plus tard, (vers la fin mai) lorsque les jeunes sont plus grands, ils sortent la tête et se présentent à la sortie de la loge en attendant leur bectance, c’est l’occasion unique de faire la photo de famille. Les jeunes quittent le nid à l'âge de 27-28 jours vers début juin. Après leur envol, une partie d’entre eux est accompagnée par le mâle et une autre par la femelle. L’indépendance définitive est acquise fin juillet ou en août. Le plumage des jeunes à la sortie du nid est plus ou moins nuancé de brun avec un bec nettement plus court, paraissant plus épais. Les nichées comprennent un peu plus de mâles que de femelles reconnaissables très précocement à la seule observation de l’étendue de leur calotte rouge. L’échec de la reproduction vient souvent du Choucas et du Pigeon Colombin qui cherchent à usurper le nid du pic avant même que la ponte ait commencé, mais surtout, du fait d’inondation du nid lors de printemps très pluvieux. Le Pic noir n’effectue qu’une seule nichée par an, mais une ponte de remplacement est possible dans la même cavité ou une autre, à proximité. La longévité maximale observée grâce aux données de baguage est d’environ 14 ans.

TROUVER UNE LOGE

“ trouver une loge active à bonne hauteur, bonne orientation, est plus difficile “ J’ai passé trois ans à découvrir cette espèce, à consulter des sites spécialisés, à éplucher une étude très complète de Volker Günther un ornithologue Allemand qui a inspecté plus de 800 loges sur trois ans. J’ai ensuite appris à repérer les loges, à comprendre les habitudes du pic, à reconnaitre son chant ses cris, que dis-je ? ses chants et ses cris car oui il en a plusieurs. Trouver une loge à pic n’est pas facile au début, mais au fil des trouvailles, cela devient un automatisme et on décèle immédiatement l’arbre qui potentiellement pourrait contenir une loge, c’est même addictif, je ne peux plus marcher en forêt sans lever la tête lorsque je vois un hêtre à potentiel de loge. Le plus difficile étant de trouver une loge active le temps de la ponte et du nourrissage des petits pics, car une fois les petits envolés, cette loge restera inoccupée ou juste occupée le soir en guise de dortoir. Lorsque l’on est en présence d’une loge à Pic Noir, il est impératif de prendre ses précautions pour ne pas déranger l’oiseau surtout pendant la période de reproduction. Donc trouver une loge est devenu relativement facile pour moi aujourd’hui, trouver une loge active c’est plus délicat, mais trouver une loge, active à bonne hauteur, bonne orientation et bonne lumière pour la photo est bien plus difficile. Et puis pour ne rien simplifier, le Pic Noir est très farouche, le bruit du déclencheur peut le faire fuir. Un petit conseil, si vous cherchez des loges faites-le au courant de l’hiver lorsque les arbres sont dépourvus de feuilles, car une fois la forêt reverdie, cela devient bien plus difficile.

POUR LE DECOUVRIR

“ Surtout écoutez ! Kru kru kru… il vole. Klieuuuuuu… il est posé. Couic-Couci- Couic-Couic-Couic… répétitif il chante. Un Kouic bref, il est dérangé et il le fait savoir Parcourez les forêts de grands hêtres ou mieux les forêts mixtes de hêtres et résineux. Cherchez les traces de son passage en inspectant les arbres morts et levez les yeux lorsque vous êtes en présence d’un beau hêtre, droit, lisse, assez haut, sans branches sur au moins 6 mètres et le plus souvent dans un endroit dégagé comme en bordure d’un chemin forestier par exemple. Mais surtout écoutez ! - Kru kru kru kru kru kru… l’oiseau est en vol. Lui seul émet ce cri très caractéristique qui s’entend de très loin. - Klieuu …, klieuu…, tiens, il s’est posé et lance cri reconnaissable entre mille. Lorsqu’il chante vous aurez droit au Couic-couic-couic-couic-couic… répétitif. C’est un peu comme le pic vert mais avec l’expérience on sait différencier les deux très facilement. Son chant résonne en forêt et s’étend sur un kilomètre. Si vous avez la chance de le voir s’accrocher au tronc d’un arbre, vous allez être surpris par le silence de son vol à l’arrivée. Seul le claquement des griffes sur le tronc sera audible. Lorsqu’il est dérangé, il le fera savoir et partagera ce dérangement avec ses congénères par un “Kouic” bref et puissant. L’avez-vous vu passer ? Son envergure de 75 cm, lui impose de voler différemment des autres oiseaux, avec ses ailes relativement courtes il a l’allure du geai avec peu de battements il peut zigzaguer entre les arbres. Une fois agrippé, il va grimper par des bonds puissants, appuyé solidement sur sa queue rigide. Un bec blanchâtre, un iris clair et sa drôle de pupille noire, une tête anguleuse, la calotte écarlate, c’est un mâle. Et puis tout à coup, ce grand fracas ? On dirait une rafale de mitrailleuse… C’est le tambourinage. Tous les pics le pratiquent par exemple sur une branche sèche qui sert de caisse de résonnance. Mais alors celui du pic noir, c’est impressionnant, il dure entre une et trois secondes, comporte 35 à 45 coups de bec et est audible à plus d'un kilomètre. Le martèlement, des séries de 80- 140 coups de bec/minute, exprime l'excitation, surtout en présence d'un congénère et n’est, lui, audible qu’à faible distance. Le piquage (réaction à un dérangement, par exemple au nid) est encore plus faible.
24 mars 2015 26 mars 2015

LE PHOTOGRAPHIER

“ Pour le prendre en vol à l’arrivée à la loge, anticipez le déclenchement “ Le moyen efficace d’observation est la tente d’affût, un simple camouflage ne sufffit pas, soignez votre planque car chacun de vos mouvements va alerter le pic et le déranger. Le Pic Noir se réveille tôt, donc pour ne pas être vu, l’idéal est d’arriver de nuit. Une alternative est la phase d’observation pour anticiper les allées et venues du Pic. Installez-vous pendant leur absence. Cet exercice pour trouver le moment opportun de l’installation est difficile au début, ensuite après plusieurs séances d’observation cela devient plus facile. Quoi qu’il en soit commencez toujours par une observation aux jumelles et à bonne distance avant d’agir au risque de le déranger, puis installez-vous rapidement et ne faites plus aucun bruit. Pour quitter l’affût choisissez le moment les pics ont soit quitté le logement ou quand ils sont confinés dans la loge. Après de longues observations vous saurez trouver le moment opportun. Lors de la première observation du Pic Noir il ne faut pas agir immédiatement, il faut prendre le temps d’observer son comportement et le laisser s’habituer à votre présence avant de déclencher, cela est frustrant, mais c’est impératif. Lors de la phase d’observation aux jumelles, regardez comment et par le Pic accède à la loge et placez votre affût en conséquence. Avec du recul, je constate que le pic noir est bien moins farouche qu’un pic cendré ou un pic vert. Il va s’habituer à votre présence si pour autant vous restez bien caché, immobile et si vous eliminez le bruit du déclencheur en habillant votre boitier d’une housse en complément du mode silencieux. Perturbé, il va montrer des signes d’inquiétude par de petits cris plaintifs et puis au fil du temps, si la gène n’est que telmporaire et limitée, il va s’accomoder de la situation. C’est qu’il est utile de savoir juger de l’importance des cris plaintifs. Si les cris sont puissants et incessants, c’est que vous êtes trop bruyant, trop voyant ou trop près tout simplement, en somme que vous dérangez trop et il faut alors quitter les lieux. Il faut apprendre à se tenir à bonne distance, arriver et partir au bon moment et se faire très discret. Techniquement, une focale de 300mm est un minimum, couplée à un boitier APS-C cela peut suffire. Il faut privilégier les focales à grande ouverture et un 300 f4 est le minimum. Personnellement j’utilise un boitier Nikon D750 équipé d’un objectif Nikon 200-500 f5.6 à ouverture constante, monté sur trépied. C’est le milieu qui va conditionner vos réglages. En milieu dégagé avec une bonne lumière c’est plutôt facile et votre vitesse minimale pour le prendre en phase d’arrivée en vol sera de 1/2000s au moins. Lorsque c’est encombré ou mal éclairé et que la vitesse manque, profitez des moments le pic est statique, accroché à l’arbre, attendez le moment la tête du pic se détache du tronc, pour cela placez votre affût non pas face à la loge mais plutôt de profil. En milieu encombré, une option est de faire des photos à contre-jour, cela vous permet de réaliser une photo à bonne vitesse malgré un manque de lumière. Faites en sorte que l’oiseau se détache du fond et surtout anticipez votre déclenchement, car ça va très vite. Une astuce est de préparer votre cadrage, utiliser une télécommande pour déclencher puis de quitter l’œilleton du boitier et veiller à son arrivée. Il arrive que le Pic annonce son arrivée quelques minutes avant par un cri au loin, soyez alors très attentif pour déclencher par anticipation. Avec l’habitude on arrive à déclencher au bon moment et aujourd’hui je me passe du mode rafale pour faire le moins de bruit possible en déclenchant. Il arrive souvent par le bas de la loge et remonte au dernier moment en sortant ses aérofreins à la dernière seconde. Lorsque le soleil joue avec le feuillage et crée des ombres ou quand il éclaire le tronc brillant du hêtre, profitez de ces instants pour faire du clair-obscur en utilisant le mode de mesure d’exposition ponctuel. Et n’oubliez pas, lorsque les conditions sont difficiles, osez les contre-jours, les ombres chinoises, les reflets… ce n’est pas le matériel qui fait une belle photo, mais c’est le photographe qui aura su mettre à profit des conditions particulières par sa créativité. Bref, vous allez voir qu’on se s’ennuie pas dans sa tente affût en photographiant le Pic Noir. Dernier point : évitez les lieux de passage, de randonneurs, de vététistes. Ce n’est pas qu’ils dérangent le pic, car lui est habitué à leurs passages, mais s’ils voient votre tente affût ils vont venir voir et discuter, faire du bruit et le Pic mettra d’autant plus de temps à revenir sur les lieux, je parle d’expérience. Vous l’aurez compris, le Pic Noir fascine, me fascine, mais attention si vous avez l’occasion de l’observer et de partager quelques instants en sa compagnie, vous courrez un risque, celui de l’ addiction et il est difficile d’en sortir, vous voilà prévenus ! Sources: Cahiers d’habitats “Oiseaux” MEEDDAT- MNHN - Untersuchungen zur Ökologie und zur Bioakustik des Schwarzspechtes (Dryocopus martius) von Volker Günther - Des pics et des arbres par Philippe Legrand & Michel Bartoli - Revue Forestière Française par M.Cuisin 1967 - Der Schwarzspecht und seine Hölen (Deutsche Wildtier Stiftung Dr.Prof. Roman Herzog) - Et évidemment mes propres observations.
femelle mâle
74 loges répertoriées sur 6 ans. Les 74 loges sont réparties sur 49 arbres. Tous sont des hêtres d’un Ø supérieur à 40 cm à hauteur d’épaule . 31 arbres comportent 1 loge. 13 arbres comportent 2 loges. 3 arbres comportent 3 loges. 2 arbres comportent 4 loges. Les loges se situent entre 6 et 15 m de hauteur. La moyenne se situe à environ à 8-9 m. Les arbres sont toujours dépourvus de branches sous le niveau de la loge. Les arbres sont généralement lisses et droits (pour limiter l’accès aux prédateurs). L’orientation des loges reste aléatoire même si on devine un pic vers l’ouest et le sud-est (voir graphique ci-contre), selon mes observations elle dépend principalement de la topographie du terrain. Une loge sera placée de manière à favoriser l’arrivée à la loge et l’envol depuis la loge, en clair, elle sera toujours orientée vers un endroit bien dégagé.

LE PIC NOIR en

images

Au départ juste une rencontre, aujourd’hui, une passion

Extrait du carnet de terrain et

fréquence de nourrissage

LA LOGE, c’est un peu l’Auberge Espagnole “ Certaines espèces ne seraient pas présentes sans la présence du Pic Noir”  Le Pic Noir est un architecte de la forêt, avec son bec puissant (qui pousse sans cesse), il creuse le tronc des arbres  (hêtres principalement) pour y loger sa petite famille. L’espèce  peut  être  fidèle  à  son  nid  plusieurs  années.  Le  nid  est  creusé  dans  un  arbre  sain,  directement  ou  par agrandissement  d'une  ébauche  antérieure. La plupart du temps, il débutent un chantier, puis s’accordent une pause en comptant sur l’aide des champignons qui vont dégrader le bois, les fibres du bois deviennet alors plus tendres et le chantier peu continuer. Un jour arrive où la loge est prète à être habitée, mais les travaux ne sont pas finis pour autant. Plusieurs cavités sont creusées certaines pour la couvaison, d’autre pour le repos, et chaque année les loges sont rafraichies. Le champigon gagne en profondeur et la loge devient de plus en plus profonde jusqu’au jour où elle est trop profonde pour les oisillons, c’est le moment de laisser la place aux autres habitants.  Le  nid  est  creusé  par  les  deux  sexes  mais  surtout  par  le  mâle. Une cavité de 30 à 60 cm de profondeur fera office de logement pour la période de reproduction. Cette cavité ne servira que le temps de nidification jusqu’à l’envol des jeunes pics. Il arrive que plusieurs loges se trouvent sur un même arbre. Le fond est garni de poussière de bois et de quelques copeaux. Les loges à Pic Noir sont difficiles à confondre, elles sont ovales et mesurent de 8 à 9 cm de large et 12 à 14 cm de haut. L’arbre doit avoir le tronc dépourvu de branches sur une hauteur de 5 à 20 m et être assez gros (diamètre 40cm à 50cm minimum) et il présente en général une écorce lisse pour éviter aux prédateurs un accès trop facile à la loge. On constate généralement une préférence pour le hêtre ou la partie haute du pin sylvestre. D’autres   essences   sont   cependant   également   utilisées selon le milieu  (chênes,   peupliers,   tremble,   merisier,   sapin pectiné, ...  Mais le travail du pic profitera à d’autres clients.  Des squatters vont se succéder et certaines espèces ne seraient pas présentes dans nos forêts sans la présence du Pic Noir. Le pigeon Colombin par exemple, un pigeon forestier et migrateur. On pourra y voir aussi la chouette hulotte, la chouette chevêchette ou la plus rare chouette de Tengmalm. La sitelle torchepot qui retravaille soigneusement l’entrée avec de la boue avant d’y nicher. Des mammifères comme la martre, le loir ou l’écureuil, mais aussi des chauves-souris, s’y succèdent. Certains anciens nids de pic noir sont remplis de miel par des essaims d’abeilles, d’autres hébergent des nids de frelons.  Si au pied d’un beau hêtre vous trouvez des copeaux d’une taille comprise entre 0.5 et 4 cm de long et de quelques millimètres d’épaisseur, c’est un pic noir qui creuse une loge, alors levez les yeux !   Le Pic Noir reste dépendant des vieilles forêts et des arbres morts, il est utile de protéger ces arbres morts qui représentent son garde-manger. Depuis quelques années, l’ONF maintient sur pied certains arbres à cavités, ils sont souvent marqués d’un triangle renversé ( c’est un moyen aisé de trouver des loges ! )  ainsi toute une variété d’espèces bénéficie des loges de Pic Noir.
Janvier- février: Formation des couples. Mars - début avril: Creusage ou réhabilitation d’une loge. Mi-avril - fin avril: Ponte et incubation (12 à14 jours) Début mai à mi-mai: Eclosion puis nourrissage (27 à 28 jours) Fin mai - début juin: Envol.

Calendrier des activités

(constaté en Lorraine dans le massif Vosgien)

Arbre à 3 loges, on devine que celle du haut est la plus récente. Celle du bas est cicatrisée. Des traces de coups de becs sont visibles sur le tronc.
Une loge réhabilitée par un couple de sitelles torchepot Quelques données basées  sur mes propres observations

Faire une photo en contre-plongée au pied

de l’arbre est-ce source de dérangement ?

Les 3 points essentiels à mon sens:

1. La période pour faire la photo :

Ne pas vouloir faire cette photo en période de

couvaison ou de creusage de la loge lorsque la

présence des pics est permanente. Il faut choisir

le moment où les jeunes pics sont nés, car c'est là

que les parents s'absentent un bon moment pour

leur quête de nourriture avant de revenir à la

loge.

2. Le moment opportun :

Voilà l'importance de passer du temps en leur

compagnie, apprendre à savoir quand il partent et

quand ils viennent. Certes ils ne mettent pas à

disposition la fiche horaire type SCNF, mais avec

l'expérience j'ai constaté qu'il y a toujours un

créneau suffisant ou aucun des deux pics n'est

présent pour installer le trépied sans déranger. Il

faut arriver à déceler le vrai départ de la loge d'un

déplacement ponctuel où le pic reste dans les

alentours en surveillance de son congénère, cela

ne s'improvise pas mais s'apprend au fil des

années, oui, je dis bien des années et non de

quelques heures d’observation.

3. Le déclenchement :

Le boitier doit être camouflé et surtout emballé à

outrance, j'utilise un vieux sweat et j'emballe mon

boitier comme pour un envoi DHL !

Testez le résultat chez vous et n'improvisez pas

sur place en dernière minute.

Une fois le pic arrivé à l'arbre concentrez-vous sur

l'attitude du pic, ne déclenchez que quand c'est

nécessaire. Attendez qu'il tourne la tête sur le

côté, photographier sa nuque ne sert à rien ! Je

me sert du boitier dans la tente affût pour

visualiser à travers l'œilleton le moment propice

pour déclencher, si vous n'utilisez qu'un boitier,

observez aux jumelles.

Ma réponse est oui et pourtant je le pratique !

Cette question je me la suis posée lors du festival

photo Natur’Emotion de Scy-Chazelles (en 2013)

où j'ai pu m'entretenir longuement sur le sujet

avec un photographe de renom belge qui l'avait

pratiqué. J'ai alors appris qu'il faut apprendre à le

connaître, savoir décoder ses cris, son

comportement bien avant de vouloir appuyer sur

le déclencheur.

J'ai côtoyé le pic pendant 4 ans (4 saisons) sans

faire la photo que je m'étais imaginée. Je peux

aujourd'hui affirmer que je suis capable de

prendre ce type de photo sans dérangement

majeur, car on dérange toujours si ce n'est que

par sa simple présence.

Je partage aujourd'hui mon expérience

simplement dans l'intérêt du respect des règles

nécessaires si vous êtes tenté par ce type de prise

de vue.

Avant tout, préparez votre matériel à l'avance

pour minimiser le temps d'installation, pas

d'improvisation sur place. Montez votre boitier

sur le trépied, vérifiez que vous êtes capable de

maintenir le boitier en bonne position vers le haut

sans qu'il ne se dérègle (rotule non adaptée,

zoom trop « lâche »...) On teste l'ensemble avant

l'installation, on vérifie que le boitier réponde

bien à la télécommande et on s'assure que piles

et accus soient bien chargés.

Réglez le boitier en mode silencieux, utilisez une

télécommande radio de grande portée (je suis à

plus de 30m), un trépied camouflé et surtout de

quoi insonoriser votre boîtier correctement.

Personnellement j'utilise une optique fixe (300 f4),

car un zoom en position verticale peut bouger s'il

n'est pas assez « ferme » et un boitier avec un

écran orientable pour faciliter la mise au point.

Ma première tentative n'a pas été la bonne car

j'avais sous-estimé le bruit du boîtier, il faut

vraiment emmitoufler l'ensemble boitier/objectif.

Pour ce faire, je fais la mise au point sur le bas

de la loge (c'est là que viendra s'accrocher le pic),

puis je verrouille le réglage. Pas d'autofocus

Lorsque l'on débute la photo du pic noir, on

commet des erreurs, on bouge trop, on est mal

caché, on arrive au mauvais moment, on est trop

prêt, on fait du bruit et cela se traduit par un

comportement sonore du pic. Le pic perturbé le

signale à son conjoint et à son entourage par des

cris plaintifs successifs, c'est le signe que vous

dérangez.

En 2015, j'ai passé une semaine complète en leur

compagnie, 6 jours tous les jours et pourtant je

n'ai pas réussi à faire de belles photos mais j'ai

appris à les connaitre.

Alors, faire une photo en contre- plongée de

pic noir au pied de l'arbre est-ce source de

dérangement ?

Ma réponse est toujours oui, mais de manière

maîtrisée. Le moyen de m'en convaincre est le

silence du pic lorsqu'il arrive à la loge et lorsque

je fais ma photo, pas un cri d'avertissement, il

vaque à ses occupations comme si de rien

n'était.

Connaissant aujourd’hui son comportement face

au dérangement, son silence est pour moi la

meilleure des preuves.

Marc Albrecht Photographies
Marc Albrecht
Marc Albrecht